Épaisse, paisible, envoûtante, mystérieuse. Comme partout ailleurs, la nuit peut être vue sous différents angles à Stonehaven, cette bourgade du fin fond de l'Écosse. Les lampadaires de la ville laisse flotter leur lumière, hésitante parfois, sur les allées et les trottoirs. À cette heure-ci, plus personne ne traîne encore dehors. Il reste quelques éternels habitués dans le bar le plus proche, à enfiler les verres sans prêter attention au propriétaire qui commence à s'impatienter. Mais à part ça, non. Vraiment, au beau milieu, il n'y a perso... Excusez-moi. Il y a parfois quelqu'un. Quelqu'un planté sur une place ou une autre, le regard perdu, l'air raide. Avec cet air pâlichon qui donnerait presque l'impression que l'époque de la grippe est revenue. Mais non, l'explication n'est pas là. Il suffit qu'il s'approche peut-être un peu d'un lampadaire pour qu'on remarque. Quoi ? Les feuilles mortes qui restent encore un peu accrochées à ses vêtements. Le peu de terre encore fiché dans ses cheveux, aussi. C'est drôle. Mais comme ça, on dirait presque que ce type a vu la mort tellement son air est singulièrement perdu. Hum. Peut-être que si vous faisiez un tour dans le cimetière du coin, vous rigoleriez moins. Il y a sa photo, sur l'une des pierres tombales ? Bingo. Ce n'est pas une coïncidence, désolé de vous l'apprendre. C'est exactement le même type. Ah, ça vous choque, vous criez que c'est impossible ? Pauvres gens. Vous n'êtres pas du coin, j'imagine. Ici, on s'est plus ou moins fait à la chose, à force. Il y a des événements qu'on contrôle et d'autres qu'on ne contrôle pas. Et à Stonehaven, on a arrêté de chercher les explications, au bout du compte. Parce que, que vous ne l'admettiez ou non, parfois des morts revivent, dans cette ville. Après, rien ne nous dit que la seconde chance pour laquelle ils sont revenus nous sera forcément bénéfique. Mais les secondes chances sont rares, alors il vaut mieux les saisir quand elle se présentent à nous. Qu'on soit vivant. Ou qu'on soit mort.